ITINÉRAIRE DE CARÊME | Jour 15 : « La lutte contre l’orgueil »

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Le vice spirituel le plus difficile à vaincre est sans aucun doute l’orgueil. Il faut une lutte constante et une forte grâce de Dieu pour fuir l’orgueil et vivre dans cette humilité qui le contrecarre et l’affaiblit de manière décisive.

Jean Cassien décrit l’orgueil en ces termes : « C’est une bête cruelle, qui attaque férocement même les parfaits et peut blesser avec un poison mortel ceux qui sont proches de la perfection ».

Nous savons que c’est l’orgueil qui a entraîné la chute de Lucifer. Enivré par sa propre sagesse et son haut rang, il ne voulait plus être redevable à Dieu et a perdu sa béatitude. Cassien poursuit :  » Le vice de l’orgueil, qui l’a fait tomber, a été transmis par Lucifer au premier être humain, et ainsi a été semé dans l’homme ce qui devait devenir la substance de tous les autres péchés.  »

Comme dans la lutte contre tous les autres vices, il faut bien comprendre que c’est avant tout la grâce de Dieu qui accorde la victoire. Il s’agit donc en premier lieu d’une victoire du Seigneur. Si nous devions dépendre de nous-mêmes, même toutes les pratiques ascétiques ne suffiraient pas à nous faire triompher, aussi utiles et nécessaires soient-elles. Parfois, Dieu permet que nous fassions l’expérience de notre incapacité, pour nous préserver du poison mortel de l’orgueil.

Nous connaissons bien l’exemple de saint Paul, qui reçut une « sorte d’aiguillon » pour l’empêcher de devenir vaniteux (2 Co 12,7). Bien qu’il ait prié trois fois le Seigneur de l’enlever, celui-ci ne l’a pas délivré de cet aiguillon (v. 8-9). Ainsi, l’Apôtre a toujours gardé à l’esprit que toutes ses sublimes révélations et son fructueux ministère apostolique n’étaient pas dus à ses propres forces et mérites, mais à la grâce de Dieu.

Saint Paul n’est pas le seul à avoir fait l’expérience de sa faiblesse de cette manière. Sur notre chemin de disciple, notre Père céleste, connaissant bien la toxicité de l’orgueil, nous permet de ressentir nos faiblesses, afin que nous arrivions à la même conclusion que saint Paul : nous devons tout à la grâce de Dieu.

Mais cela ne nous dispense pas de collaborer à la lutte contre l’orgueil. En premier lieu, nous devons implorer du Seigneur une véritable humilité et reconnaître les ruses de l’orgueil dans notre propre cœur. Nous devons être conscients que l’orgueil cherche toujours à se cacher et qu’il est, pour ainsi dire, trop fier pour admettre son orgueil. Une personne piégée dans un tel degré d’orgueil se replie sur elle-même et prétend se rendre invulnérable, sans se rendre compte de l’horrible visage que montre son orgueil.

Associée à la prière pour une véritable humilité (qui, soit dit en passant, n’est pas une servilité ou une fausse soumission), la gratitude est un remède efficace contre l’orgueil. Comme le dit Cassien, c’est en cela que consiste la véritable humilité. On peut observer que les personnes qui ont tendance à l’orgueil ont du mal à être reconnaissantes.

En ce sens, nous pouvons examiner notre cœur en utilisant ce critère : sommes-nous reconnaissants ou prenons-nous tout pour acquis, comme si c’était notre droit, ou avons-nous même en nous une attitude d’accusation, que ce soit contre notre prochain, contre la vie ou même contre Dieu lui-même ?

L’humilité – le remède à tout orgueil – s’apprend tout d’abord auprès du Seigneur lui-même : « Ayant la condition de Dieu, ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu. Mais il s’est anéanti, prenant la condition de serviteur, devenant semblable aux hommes. Reconnu homme à son aspect » (Ph 2, 6-7).

En toutes choses, Jésus a obéi au Père et l’a glorifié. C’est aussi l’appel qui nous est adressé : ne pas chercher à nous mettre en avant, mais servir comme le Seigneur l’a fait (Mt 20,28).

Voici un autre point pour grandir dans la véritable humilité : l’attitude de service. Nous servons le Seigneur comme ses enfants et nous servons les personnes comme le Seigneur les a servies. La méditation de l’attitude de la Vierge Marie envers Dieu nous aidera également à acquérir cette réceptivité qui, à son tour, favorise l’humilité.

En outre, nous devons veiller sur notre propre cœur, percevoir les attitudes et les pensées orgueilleuses, nous en détourner et les présenter au Seigneur. À mesure que nous grandissons dans la connaissance de nous-mêmes, il nous sera plus facile de percevoir notre orgueil.

Dans le contexte de notre voyage de Carême, nous ne pouvons pas énumérer toutes les ruses de l’orgueil. Il existe de nombreux bons livres qui nous aident à contrer ce mal. Moi-même, j’aborde aussi ce sujet à maintes reprises dans mes méditations et conférences quotidiennes. Malheureusement, il est nécessaire de le faire.

Pour aujourd’hui, restons-en à ce qui suit : louons avec une profonde gratitude tout ce que Dieu a fait et continuera à faire pour nous. Gardons à l’esprit que nous ne pourrons jamais vaincre le vice de l’orgueil par nous-mêmes, ni aucun autre vice d’ailleurs. Demandons au Seigneur la grâce de mieux identifier et combattre notre orgueil et de grandir dans l’humilité. Les yeux fixés sur Jésus, entrons dans son école pour apprendre à glorifier le Père et à servir les hommes. Veillons sur notre cœur, afin que – si possible – nous puissions percevoir et rejeter l’orgueil dès ses premières manifestations.

Dans la méditation de demain, nous reviendrons sur les étapes que nous avons traversées jusqu’à présent dans notre parcours de Carême, nous respirerons profondément et nous nous concentrerons ensuite sur quelques vertus. En effet, ce sont ces vertus qui doivent prendre la place des vices dans notre cœur, en faisant resplendir la beauté et la dignité de notre chemin avec le Seigneur.

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