Rom 6,19-23
Je sais que le bien n’habite pas en moi, c’est-à-dire dans l’être de chair que je suis. En effet, ce qui est à ma portée, c’est de vouloir le bien, mais pas de l’accomplir. Je ne fais pas le bien que je voudrais, mais je commets le mal que je ne voudrais pas. Si je fais le mal que je ne voudrais pas, alors ce n’est plus moi qui agis ainsi, mais c’est le péché, lui qui habite en moi. Moi qui voudrais faire le bien, je constate donc, en moi, cette loi : ce qui est à ma portée, c’est le mal. Au plus profond de moi-même, je prends plaisir à la loi de Dieu.
Mais, dans les membres de mon corps, je découvre une autre loi, qui combat contre la loi que suit ma raison et me rend prisonnier de la loi du péché présente dans mon corps. Malheureux homme que je suis ! Qui donc me délivrera de ce corps qui m’entraîne à la mort ?Mais grâce soit rendue à Dieu par Jésus Christ notre Seigneur ! Ainsi, moi, par ma raison, je suis au service de la loi de Dieu, et, par ma nature charnelle, au service de la loi du péché.
Dans ce passage, saint Paul décrit la lutte contre notre propre chair ou, en d’autres termes, la lutte contre nos mauvais penchants.
Les maîtres de la vie spirituelle nous enseignent qu’il y a trois ennemis que nous affrontons sur le chemin à la suite du Christ. D’une part, la lutte contre le Diable ; d’autre part, la lutte contre les attraits et les séductions du monde ; enfin, la lutte contre la chair, c’est-à-dire la lutte contre nos appétits désordonnés, tant spirituels que corporels.
On peut peut-être dire que ce dernier combat est le plus difficile, car nous sommes constamment confrontés à notre propre chair. Saint Paul le décrit très clairement : la raison n’est pas assez forte pour résister aux séductions du péché. C’est une conséquence du péché originel, dont les effets ont été encore aggravés par les péchés personnels.
Il est nécessaire de connaître ce déplorable « inventaire » qui nous a été laissé en héritage, afin de ne pas faire une estimation erronée de la situation de l’homme sur la base de la bonté supposée de sa nature.
Nous devons avoir la vision réaliste que donne la doctrine authentique de l’Église . Notre volonté a été affaiblie, mais elle n’a pas été complètement annihilée. C’est pourquoi, avec la grâce de Dieu, nous pouvons entreprendre de contrecarrer les inclinations négatives de notre nature déchue. Il est nécessaire de mener ce combat, de retrouver en quelque sorte l’intégrité de notre personne et de reprendre la seigneurie sur nous-mêmes, évidemment sous la domination de Dieu.
Ce combat est ce que les maîtres spirituels appellent « l’ascèse ». L’Apôtre des Gentils nous a fait comprendre que c’est Notre Seigneur Jésus-Christ qui peut nous sauver de cette condition de pécheur. Ce n’est qu’en lui et avec son aide que nous pouvons contrer durablement nos mauvais penchants ; ce n’est que par lui que nous pouvons mener ce combat, sans abandonner après avoir subi des défaites.
En premier lieu, nous devons examiner nos penchants charnels, c’est-à-dire nos passions désordonnées. Une colère débridée conduit au péché d’injustice ; un désir sexuel désordonné est destructeur ; un appétit excessif pour la nourriture peut conduire à la gloutonnerie ; la paresse nous empêche de faire le bien ; la cupidité lie l’homme à lui-même et restreint sa capacité d’aimer, etc.
Il y a aussi d’autres inclinations en nous, que le Seigneur mentionne clairement, en nous enseignant que tout le mal vient du cœur de l’homme (cf. Mt 15, 19).
S’engager sérieusement dans la lutte contre tous ces penchants exige une décision fondamentale. Nous devons être disposés à nous connaître nous-mêmes, à affronter honnêtement le mal qui est en nous et à le reconnaître.
Nombreux sont ceux qui ont peur de se voir à la lumière de Dieu. Ils ont tellement peur de ce qu’ils pourraient trouver en eux-mêmes qu’ils oublient qu’ils se trouvent devant un Père aimant qui veut les aider à déployer l’image de Dieu qu’ils portent en eux. C’est pourquoi ils préfèrent fermer les yeux sur leurs mauvais penchants et ne les combattent donc pas non plus résolument avec l’aide de Dieu. Mais cette attitude aura des effets négatifs et pourra même se répercuter sur leur religiosité, la rendant artificielle et moins authentique, parce qu’ils ont tendance à ne vouloir voir que leurs côtés positifs, en refoulant les négatifs.
Il est bon de regarder la réalité en face ! « Le Seigneur corrige ceux qu’il aime », nous dit l’Écriture Sainte (He 12,6). C’est donc l’amour de Dieu qui veut que nous luttions, avec son aide, contre nos mauvais penchants et que nous essayions de mettre en pratique les vertus. Si, par exemple, je suis enclin à une colère excessive, je ne peux pas simplement me laisser emporter par cette passion, mais je dois essayer de la contrôler avec l’aide de Dieu. Si la colère éclate en moi, je ne dois pas la justifier, comme c’est malheureusement souvent le cas, mais je dois commencer à prier intérieurement et ainsi freiner cette passion désordonnée. Nous devons garder à l’esprit ces paroles de l’Écriture : « la colère de l’homme ne réalise pas ce qui est juste selon Dieu. » (Jacques 1:20). En outre, nous devons demander au Seigneur de nous rendre doux et, pour notre part, nous efforcer d’acquérir cette vertu.
Ce que nous avons dit dans cet exemple à propos de la colère peut s’appliquer à toutes les autres passions désordonnées, comme, par exemple, retenir une sexualité désordonnée et, en même temps, s’efforcer d’acquérir la vertu de chasteté. Ce sera un long combat, mais nous pourrons ainsi prouver notre fidélité au Seigneur.